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SWAPS nº 15

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Le testing fait du lobbying

"Une fausse sécurité" pour l'INSERM

par Isabelle Grémy

En 1998, un rapport d'expertise de l'INSERM sur l'ecstasy réalisait un état des lieux des connaissances sur cette nouvelle consommation, ses dangers -notamment son éventuelle neurotoxicité-, ses contextes de prise et ses types de consommateurs. Les conclusions de ce rapport d'expertise soulignaient notamment la nécessité d'informer sur "la toxicité de l'ecstasy, ses complications somatiques parfois mortelles, comme un syndrome d'hyperthermie ou des hépatites. Tout aussi graves que les complications somatiques, des troubles de nature psychiatrique (psychoses et dépression) ainsi que des perturbations des fonctions cognitives (troubles de la mémoire, de l'audition) peuvent apparaître plus ou moins longtemps après la prise d'ecstasy."

Ainsi, au regard de la toxicité de l'ecstasy, le rapport des experts de l'INSERM "met en garde contre le testing" en argumentant qu’"informer sur les conséquences graves que peuvent engendrer la consommation de MDMA" apparaît, "d'autant plus justifié que certains attribuent, à tort, la toxicité de l'ecstasy non pas à la MDMA elle-même, mais à l'impureté des comprimés qui, selon les cas, peuvent contenir des amphétamines, des anabolisants, des analgésiques, des hallucinogènes. Ce type de raisonnement a conduit à préconiser la pratique du testing sur les lieux de consommation. Cette technique, qui repose sur un test de coloration peu spécifique, présume, tout au plus ,de la présence de MDMA dans le comprimé. Dans le cas où le test laisse supposer que le comprimé est exclusivement constitué de MDMA, le risque ne doit pas pour autant être écarté : la MDMA est une substance toxique". La pratique du testing entraînerait selon le rapport "une fausse sécurité pour l'usager et une lourde responsabilité pour le testeur". Les experts de l'INSERM recommandent à ce sujet "qu'une procédure d'évaluation scientifique des actions de prévention destinées aux jeunes soit effectuée, en toute indépendance vis-à-vis des acteurs de terrain et des décideurs institutionnels".

Il s'agit-là de la position des experts de l'INSERM à la mi-1998. Le rapport a certainement contribué à démontrer la non-innocuité de l'ecstasy. En revanche, il fait totalement abstraction de l'ensemble des mesures de prévention qui entourent habituellement le testing dans les contextes de rassemblement de jeunes (rave et autres soirées techno): présence médicale, conseils de prévention notamment sur les polyconsommations qui sont sans doute les plus dangereuses, endroit de "chill out", contacts avec les soins, et enfin alimentation d'une banque de produits testés qui permettrait de connaître l'ensemble des drogues qui existe sur le marché.

Isabelle Grémy